Le gouvernement souhaitant accélérer le passage à une économie plus respectueuse de l’environnement. Dans le cadre de cet effort, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et les droits de douane ont été supprimés pour les véhicules entièrement électriques.
Latif, chauffeur de moto-taxi à Cotonou, au Bénin, conduit depuis vingt ans. La ville portuaire compte environ 150 000 conducteurs de motos-taxis appelés Zem, qui vient de l’expression fongbè « Zemidjan », qui signifie « emmène-moi vite ». Cependant, depuis qu’il a acheté une moto électrique en novembre 2022, la routine quotidienne de Latif a connu un changement significatif. La transition vers les véhicules électriques n’a pas seulement apporté des avantages économiques, mais a également renouvelé l’expérience de conduite, tant pour le conducteur que pour les passagers. Selon Latif:
« Je me sens moins fatigué lorsque je rentre chez moi après le travail. La moto électrique ne produit aucun bruit de moteur et élimine les secousses lors des changements de vitesse. Bien que les itinéraires soient les mêmes, les trajets sont totalement différents. Même si je connais bien Cotonou, j’ai l’impression de redécouvrir ma ville ».
Selon Hervé Hountondji, directeur des ventes de M-Auto, une entreprise indienne appartenant au Fonds pour la transformation et l’industrialisation de l’Afrique (ATIF), spécialisé dans l’industrie et le développement économique en Afrique, près de 3 000 motos électriques sont aujourd’hui utilisées au Bénin, principalement à Cotonou et dans ses environs. M. Hountondji a également déclaré que le réseau de motos électriques s’est étendu à Porto-Novo et presque à Ouidah. Il a également indiqué que d’ici la fin de 2023, la société vise à vendre 25 000 motos dans tout le Bénin et à remplacer 70 % de la flotte de Zem’ deux ans plus tard. Hountondji a noté que M-Auto a vendu en moyenne 50 motos par jour depuis mai 2022 au Bénin et a connu une croissance similaire au Togo.
Selon M. Latif, les avantages des motos électriques sont nombreux. Outre le fait qu’elles ne font pas de bruit, les motos 100 % électriques ont moins de composants que les motos à combustion conventionnelles, ce qui permet de réduire les dépenses d’entretien.
« Il n’y a pas de gaz d’échappement, pas de vidange d’huile et l’entretien est minime », a déclaré M. Latif. « En outre, elles n’émettent pas de polluants. »
Augmentation de la pollution
Les villes d’Afrique subsaharienne sont confrontées à un grave problème de pollution en raison de l’augmentation rapide de la population et de la densité urbaine. La pollution due au trafic routier est l’une des principales causes de décès dans ces régions.
Selon une étude réalisée en 2016 par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le nombre de décès prématurés causés par les particules fines a augmenté de 36 % en Afrique entre 1990 et 2013.
Cathy Liousse, directrice de recherche au laboratoire d’aérologie de Toulouse, a prévenu que si aucune mesure n’était prise, l’Afrique pourrait représenter la moitié des émissions polluantes mondiales d’ici à 2030, dans un entretien accordé au journal Le Monde en 2019.
Le problème de la pollution au Bénin est aggravé par l’utilisation répandue d’essence de mauvaise qualité, connue sous le nom de kpayo, qui est vendue en contrebande à de nombreux coins de rue dans des bouteilles en verre. Ce carburant provient souvent du Nigeria voisin, où l’essence est fortement subventionnée, et il est connu pour raccourcir la durée de vie des moteurs et produire des émissions de fumée noire à partir des pots d’échappement de nombreux véhicules au Bénin, ce qui entraîne une importante pollution de l’air.
Accélérer la transition verte
Mordor Intelligence, un cabinet de recherche basé en Inde et spécialisé dans l’industrie et l’électricité, prévoit que le marché des batteries en Afrique de l’Ouest connaîtra une croissance de plus de 4,9 % jusqu’en 2025. Cette croissance est en partie due à la popularité croissante des deux-roues électriques au Bénin, car de plus en plus de personnes se tournent vers ces véhicules pour contribuer à la protection de l’environnement. En outre, des incitations économiques sont en jeu.
Selon Hervé Hountondji, directeur commercial de M-Auto, les clients peuvent bénéficier de plans de paiement qui leur permettent de payer leurs véhicules sur une base quotidienne, hebdomadaire ou mensuelle. Cette option s’est avérée intéressante, car la demande pour ces motos est élevée, ce qui entraîne des délais d’attente pouvant aller jusqu’à deux mois.
Le gouvernement du Bénin a fait un pas vers une économie plus verte en exonérant les véhicules 100 % électriques de la TVA et des droits de douane, afin de les rendre plus abordables pour le public. Les motos électriques disponibles au Bénin sont fabriquées en Inde et assemblées à Glo Djigbé (GDIZ), situé à 45 kilomètres au nord de Cotonou. Bien qu’elles soient légèrement plus chères que les motos à essence traditionnelles, qui se vendent généralement à environ 600 000 francs CFA (914 euros), elles offrent une option plus durable et plus respectueuse de l’environnement. Par exemple, le modèle « Chap-chap » est vendu à 695 000 francs CFA (1 059 euros), tandis que le modèle « Commando », plus puissant et plus confortable, coûte 883 720 francs CFA (1 347 euros).
Yakoubou Ligali, un commerçant de Cotonou qui a opté pour une moto électrique en novembre 2022, a déclaré :
« J’ai fait mes calculs et je dépense beaucoup moins qu’avant grâce à cette moto. »
Les avantages sont évidents, mais l’autonomie de la batterie présente un inconvénient. Avec une autonomie d’environ 70 kilomètres par batterie et deux batteries par véhicule, les conducteurs doivent planifier leurs déplacements avec soin et s’arrêter régulièrement pour les remplacer dans l’un des 57 centres situés à Cotonou. Bien que l’opération de remplacement ne prenne que deux minutes et coûte 1 000 francs CFA (1,5 €), elle peut s’avérer gênante pour ceux qui doivent parcourir de longues distances. Latif déclare :
« Je les change deux ou trois fois par jour. J’aimerais qu’ils soient plus autonomes. »
Les véhicules électriques vendus par M-Auto au Bénin sont équipés de batteries dont la durée de vie est estimée à 10 ans et dont M-Auto est propriétaire même après l’achat. Bien que ces batteries offrent de nombreux avantages, on s’inquiète de la manière dont elles seront éliminées une fois qu’elles auront atteint la fin de leur durée de vie. Seront-elles renvoyées en Inde pour y être recyclées ou seront-elles traitées localement au Ghana, où le secteur du recyclage est déjà en plein essor ?
M. Hountondji est optimiste et pense qu’un système logistique sera mis en place pour résoudre ce problème. Toutefois, l’élimination sûre et responsable des piles usagées constitue un défi de taille. Ces dernières années, les petites installations de recyclage de piles se sont multipliées en Inde, mais nombre d’entre elles ne respectent pas les normes nécessaires à l’extraction des matériaux toxiques tels que le plomb ou le lithium, qui sont présents dans les piles. Selon l’Alliance mondiale pour la santé et la pollution, le plomb à lui seul est à l’origine de près de 233 000 décès prématurés en Inde chaque année.
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